Le sol, dispose l’article 53 de la loi du 20 juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime des sûretés2, est la propriété exclusive, inaliénable et imprescriptible de l’État. Par cette disposition, l’État congolais a nationalisé le sol, mettant ainsi un terme d’une part au régime de la propriété foncière, d’autre part à la distinction entre terres domaniales et terres indigènes, consacrés par le législateur colonial. L’article 385 de la loi ici évoquée dispose en effet que « les terres occupées par les communautés locales deviennent à partir de l’entrée en vigueur de la présente loi des terres domaniales ».
Nationalisation du sol et précarité des droits de jouissance
L’exercice des droits sur le sol est, aux termes de la loi, assujetti à l’obtention d’un Certificat d’enregistrement. Selon le cas, ce certificat confère un droit de jouissance perpétuel ou temporaire appelé concession perpétuelle ou ordinaire. La concession perpétuelle n’est accessible qu’aux Congolais personnes physiques. Les étrangers et les personnes morales ne peuvent accéder qu’à la concession ordinaire, dont la durée ne peut dépasser 25 ans. Cette dernière est toutefois renouvelable au gré de l’État. En cas de non renouvellement, la loi prévoit dans certaines hypothèses (emphytéose, superficie), une indemnité pour le concessionnaire. Celle-ci ne peut dépasser le 3/4 de la valeur actuelle et intrinsèque des immeubles incorporés au fonds.
Le sol, propriété de l’État, est géré par les administrations publiques. Des fonctionnaires investis de la qualité de conservateur de titres immobiliers délivrent aux particuliers des certificats d’enregistrement dans leurs circonscriptions foncières respectives. La compétence pour décider de l’attribution d’un terrain varie toutefois en fonction de la superficie et de la localisation du terrain sollicité. Sont habilités à attribuer une concession, selon le cas : le Parlement, le Président de la République, le Ministre des Affaires Foncières, le Gouverneur de Province et le Conservateur des Titres Immobiliers.
Deux ans après l’établissement du certificat d’enregistrement, celui-ci devient inattaquable. Les actions dirigées contre lui ne peuvent être qu’en dommages et intérêts, quand bien même celui-ci serait obtenu par erreur, par surprise ou par fraude. Pénalement toutefois, le titulaire d’un certificat obtenu par fraude peut être poursuivi pour faux en écriture et la destruction de tel certificat peut être ordonnée par le Juge.
La loi sanctionne par ailleurs d’une peine de prison (2 à 6 mois de servitude pénale et 50 à 500 francs congolais d’amende), tout acte d’usage et de jouissance d’une terre qui n’est pas fondé sur un titre régulier. Elle sanctionne de façon particulièrement sévère (6 mois à 5 ans de servitude pénale ou 50 à 300 zaïres d’amende) tout contrat de concession conclu en violation de ses dispositions impératives ou contraire aux dispositions d’ordre urbanistique. En d’autres mots, l’occupation illicite d’un terrain de même que l’usurpation des fonctions en matière foncière sont réprimés.
L’inaccessibilité (physique, juridique ou financière) des services intervenant dans la procédure d’acquisition des titres fonciers place de fractions très importantes de la population sous le coup des incriminations évoquées ci-dessus.
2 Journal Officiel de la RDC, Code foncier, n° spécial, 5/4/2006, p. 24.
Extrait de « LA CRISE FONCIÈRE À L’EST DE LA RDC » par Séverin Mugangu Matabaro. [http://www.ua.ac.be/objs/00210789.pdf]